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LEUR A-T-ON VRAIMENT VOLEÌ NOËL ?

Dur, dur, le métier d’exégète en ces temps de Noël !
Dominique Martens, directeur de Lumen Vitae, raconte : « Il m’arrive souvent de travailler les reÌ cits de l’enfance de JeÌ sus avec des groupes. Quand je dis qu’il ne s’agit
pas d’abord de comptes-rendus historiques mais de textes theÌ ologiques, certains participants me reprochent de leur voler Noël, de briser sa magie et son ambiance de paix et d’harmonie. Je suis meÌ‚me parfois suspecteÌ de vouloir deÌ truire la foi. Mais, pour moi, l’exeÌ geÌ€se ne vole pas Noël, elle le rend aÌ€ son sens profond. »

Quel est donc ce « sens profond » des reÌ cits que Matthieu et Luc attribuent aux premiers pas de JeÌ sus ? Le bibliste preÌ cise : « Ces textes sont tout entiers peÌ neÌ treÌ s de la lumieÌ€re de la reÌ surrection. Matthieu et Luc croient que Dieu a re- leveÌ de la mort JeÌ sus, le propheÌ€te assassineÌ . Ils croient que ce JeÌ sus est le fils de Dieu, le visage meÌ‚me de Dieu pour une humaniteÌ qu’il remet debout. Cette foi, les eÌ vangeÌ listes la transposent sur sa naissance. C’est donc la fin de son parcours qui commande leur relecture de ses deÌ buts. »

« LE ROI DES JUIFS »

Mais, selon Dominique Martens, ils n’insistent pas sur les meÌ‚mes facettes de leur foi. Ainsi, Matthieu, qui est un juif eÌ crivant pour des chreÌ tiens d’origine juive, voit en JeÌ sus celui qui accomplit l’histoire d’Israël et donne sens aÌ€ l’Ancien Testament. Le faire naiÌ‚tre aÌ€ BethleÌ em, ville natale du roi David, c’est affirmer qu’il est le messie, le nouveau David, le « roi des Juifs », comme il le deÌ clare au moment de sa mort. JeÌ sus est aussi le nouveau Moïse, celui que Dieu proteÌ€ge du massacre des jeunes enfants par HeÌ rode, tout comme il a sauveÌ Moïse menaceÌ de mort par le pharaon. Quand Matthieu deÌ crit Joseph, il s’inspire clairement du « Joseph vendu par ses freÌ€res » du livre de la GeneÌ€se. Comme lui, l’eÌ poux de Marie a des songes et se retrouve en EÌ gypte.

APREÌ€S LE TEMPLE

Les mages venus d’Orient offrent aÌ€ JeÌ sus de l’or, de l’en- cens et de la myrrhe, des cadeaux qui rappellent ce que les Babyloniens avaient voleÌ au Temple de JeÌ rusalem lors de la prise de la ville en 587 avant J.C. Comme si ces sages reconnaissaient en cet enfant fragile la preÌ sence meÌ‚me de Dieu, alors que, pour les Juifs de l’eÌ poque, c’est dans le Temple que Dieu habite.
Luc, lui, est un chreÌ tien d’origine grecque. Il eÌ crit pour des croyants eux aussi venus du monde païen. Dans son reÌ cit de l’enfance de JeÌ sus, il fait part de sa conviction de foi : deÌ sormais, le Temple juif ceÌ€de le relais aÌ€ l’EÌ glise. Il met constamment en contraste JeÌ sus et Jean-Baptiste dont le peÌ€re, Zacharie, devient muet dans le Temple ouÌ€ il est un preÌ‚tre, pour avoir heÌ siteÌ aÌ€ croire au message de l’ange. Il ne peut donc plus prononcer la beÌ neÌ diction. Celle-ci sera donneÌ e aÌ€ la fin de l’EÌ vangile par JeÌ sus, immeÌ diatement relayeÌ par ses disciples apreÌ€s son deÌ part.

L’EMPEREUR ET JEÌ SUS

Luc ne se situe pas seulement par rapport aÌ€ la foi juive. Il vise aussi la religion païenne et son culte de l’empereur. Il oppose CeÌ sar Auguste aÌ€ l’enfant JeÌ sus. L’empereur donne ses ordres depuis Rome et tous les sujets de l’empire lui obeÌ issent au doigt et aÌ€ l’oeil. C’est le reÌ gime de la « paix romaine ». AÌ€ la marge de l’empire, un enfant naiÌ‚t dans des conditions de pauvreteÌ et d’exclusion, il se retrouve aÌ€ dormir dans une mangeoire pour animaux. Mais cet enfant est preÌ senteÌ aux bergers par les anges (et donc par Dieu) comme « un sauveur, le Messie-Seigneur ». Il s’agit laÌ€ de titres reconnus aÌ€ JeÌ sus apreÌ€s sa reÌ surrection.
Pour l’eÌ vangeÌ liste, cet enfant est, deÌ€s l’aube de son exis- tence, le Seigneur du ciel et de la terre, son pouvoir surpasse celui de l’empereur. Mais c’est le pouvoir sans violence du Sauveur, de celui qui remet debout les humains. Les premiers aÌ€ se relever sont des victimes du systeÌ€me d’exploitation romain, des exclus, ce sont les bergers qui retrouvent, graÌ‚ce aÌ€ lui, une parole et leur digniteÌ . La paix qu’apporte le nouveau-neÌ dans son eÌ table est d’un tout autre ordre que la paix impeÌ riale.

LE JEÌ SUS DE LA FOI

Bref, pour Dominique Martens, Matthieu et Luc racontent leur foi, ils eÌ crivent de la theÌ ologie sous forme de reÌ cits. Le JeÌ sus qu’ils donnent aÌ€ connaiÌ‚tre est le JeÌ sus de la foi, celui auquel ils croient depuis qu’ils sont entreÌ s, avec leurs communauteÌ s, dans la dynamique de la reÌ surrection. Mais alors, que peut-on tirer de ces textes en regard de ce qui s’est historiquement passeÌ ?
Le bibliste reconnaiÌ‚t : « Les faits concernant la naissance et l’enfance de JeÌ sus eÌ chappent treÌ€s largement aÌ€ la recherche des historiens. Cette question des faits ne preÌ occupe pasLuc et Matthieu. Pour eux, l’essentiel est de transmettre leur foi en un Dieu surprenant, qui s’est fait enfant fragile pour que les fragiliseÌ s retrouvent gouÌ‚t aÌ€ la vie et aÌ€ la fraterniteÌ . La veÌ riteÌ de ces eÌ vangiles de l’enfance n’est pas la veÌ riteÌ de faits qu’il est impossible de prouver. Elle est la bonne nouvelle qu’eÌ prouvent les croyants d’hier et d’aujourd’hui, qui se mettent en route aÌ€ l’image de Joseph et Marie, des bergers et des mages. »

CHANGER DE NIVEAU

Et l’exeÌ geÌ€te de conclure : « EÌ vitons de jeter le beÌ beÌ (JeÌ - sus !) avec l’eau du bain ! Les faits raconteÌ s dans les reÌ cits de la NativiteÌ (tout comme les reÌ cits de reÌ surrection) ne sont pas veÌ rifiables par les sciences historiques, tout aÌ€ fait d’accord. Mais ce n’est pas une raison pour affirmer qu’ils nous trompent : leur signification profonde se situe d’abord aÌ€ un autre niveau, au plan du sens que l’on donne aÌ€ son existence. » â– 

Noël sous le regard des historiens.

La seule assurance des historiens se reÌ sume aÌ€ celle-ci : JeÌ - sus est bien neÌ un jour et quelque part et il est mort crucifieÌ en l’anneÌ e 30. Mais les circonstances de sa naissance et de son enfance leur restent largement inaccessibles. Est-il neÌ aÌ€ BethleÌ em (la ville du roi David) ou aÌ€ Nazareth (le village ouÌ€ il habite quand il commence sa « vie publique » vers l’an 28) ? Ou ailleurs encore ? Personne ne peut rien certifier. Est-il neÌ dans une eÌ table (Luc) ou dans une maison (Matthieu) ? Il est impossible de se prononcer.

En quelle anneÌ e est-il venu au monde ? L’indication de Luc du recensement de Quirinius le ferait naiÌ‚tre en 6 apreÌ€s J.C., alors que Matthieu parle du roi HeÌ rode, qui lui est mort en 4 avant J.C. Les exeÌ geÌ€tes penchent plutoÌ‚t pour 6 avant J.C... JeÌ sus a-t-il vu le jour un 25 deÌ cembre ? C’est hautement improbable. En fait, cette date correspond au solstice d’hiver et aÌ€ une feÌ‚te romaine du soleil vainqueur. C’est aÌ€ Rome, vers 360, que les chreÌ tiens remplacent la feÌ‚te païenne par la feÌ‚te de Noël. Les bergers et les mages sont-ils venus honorer le nouveau-neÌ ? Ici encore, leur preÌ sence est avant tout theÌ ologique. L’aÌ‚ne et le boeuf, indispensables aÌ€ la creÌ€che, ne figurent pas dans les eÌ vangiles canoniques mais bien dans un eÌ vangile apocryphe de l’an 200, s’inspirant d’une propheÌ tie d’Isaïe.
Et la conception virginale de JeÌ sus ? Il existe des reÌ cits de naissances merveilleuses dans l’Ancien Testament et dans la litteÌ rature du Moyen-Orient. Ainsi, le texte biblique insiste sur le grand aÌ‚ge de Sarah et d’Abraham, mais Isaac naiÌ‚t bien de leur rencontre charnelle. Dans les textes babyloniens, certains rois naissent du sperme d’un dieu avec une femme. Par contre, pour Luc et Matthieu, la naissance de JeÌ sus ne reÌ sulte pas d’une union sexuelle. En cela, elle est tout aÌ€ fait originale. Mais cette affirmation est avant tout une affirmation de foi en JeÌ sus comme fils de Dieu, il ne dit rien des modaliteÌ s pratiques de sa conception.

Joseph DEWEZ

JUTEUX BUSINESS

La majorité des commerçants le diront : « DeÌ cembre, c’est le mois de l’anneÌ e ! » Les statistiques le confirment.
Dimanche 6 novembre, la preÌ sentatrice du 13h de la chaiÌ‚ne publique annonce qu’il « sera deÌ jaÌ€ bientoÌ‚t temps de penser aÌ€ son menu de reÌ veil-
lon ». Halloween n’a pas encore remballeÌ ses sombres horreurs que le clinquant des boules et des guirlandes envahit deÌ jaÌ€ les vitrines au milieu d’une neige syntheÌ tique. Saint Nicolas fera juste une apparition, de quoi faire monter la fieÌ€vre acheteuse. La saison de Noël commence de plus en plus toÌ‚t : fin novembre, 40% des consommateurs auront termineÌ leurs achats de cadeaux de fin d’anneÌ e, affirment certaines eÌ tudes... commanditeÌ es par des feÌ deÌ rations d’entreprises commerciales.
Les clients eÌ viteront ainsi les files de la veille et l’eÌ ventuel bug des terminaux de paiement en surchauffe, comme cela avait eÌ teÌ le cas pendant trois heures le 23 deÌ cembre 2013. AÌ€ l’eÌ poque, les commerçants ont demandeÌ reÌ paration pour une perte de 20% de leur chiffre d’affaires.

PHEÌ NOMEÌ NAUX

Autre strateÌ gie : l’achat par internet, chaque anneÌ e en augmentation. C’est simple et facile. Mais attention toutefois aux arnaques. Mieux vaut aussi s’y prendre assez toÌ‚t pour eÌ viter de recevoir le preÌ cieux colis en janvier. Autre avantage du net : s’ils ne plaisent pas, « ne soyez plus geÌ‚neÌ (e) de revendre vos cadeaux de Noël », propose un site.
Les statistiques donnent le vertige. MalgreÌ la crise, les chiffrent grimpent toujours. D’apreÌ€s une eÌ tude, les Français deÌ penseront cette anneÌ e 67 milliards € pour les feÌ‚tes, soit 559 € par foyer (moyenne europeÌ enne : 623 €). Soit 1,5% de plus par rapport aÌ€ l’an passeÌ . Bien souvent, le budget alloueÌ est deÌ passeÌ . AÌ€ Noël, on deÌ lie facilement les cordons de sa bourse ! La moitieÌ des 9 000 tonnes de foie gras vendues annuellement en France le sont en deÌ cembre. Il en est de meÌ‚me pour les huiÌ‚tres, le saumon, le chocolat, les dindes.

SOUS LE SAPIN

Question cadeaux, on n’est pas en reste : en matieÌ€re de parfum, smartphones, bijoux, informatique, eÌ lectronique, jouets et livres, deÌ cembre affiche un chiffre d’affaires su- peÌ rieur de 25 aÌ€ 30% par rapport aux autres mois de l’anneÌ e. Sauf l’habillement qui attend les peÌ riodes de soldes en janvier et juillet.
Et les sapins ? En Ardenne, on en produit chaque anneÌ e de quatre aÌ€ cinq millions. Les trois-quarts pour l’exportation. C’est en prioriteÌ aÌ€ la famille que sont destineÌ s les paquets glisseÌ s sous le sapin, meÌ‚me si l’on ne rechigne pas aÌ€ se faire plaisir aÌ€ soi-meÌ‚me (11% selon une enqueÌ‚te). On n’oublie pas non plus les animaux de compagnie : les salons de toilettage se frottent les mains, de meÌ‚me que les boutiques de jouets pour chiens et chats. Milou aura aussi son petit cadeau ! â– 

Thierry TILQUIN.

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